• Où aller ? - Jeanne

    Où aller ?

     

    Ça y est, je suis partie. La porte du gendarme se dresse devant moi telle un mur. Sur le sol, le paillasson affiche pourtant un grand « Bienvenue ». A gauche, les escaliers s’enfoncent dans l’obscurité. Où aller ?

    Je descends. Dehors, les voitures sont soigneusement rangées les unes à côté des autres. Pas une seule ne dépasse les lignes blanches peintes sur le sol. Chacune à sa place et les enfants seront bien gardés. Je lève la tête et regarde les hêtres se balancer. Je ferme les yeux et écoute le bruissement des feuilles que traverse une légère brise. Où aller ?

    Je prends à gauche, en direction de la grande passerelle. Telle un immense U retourné, elle enjambe la voie ferrée. A cette heure creuse de la journée, peu de voitures l’empruntent. Où aller ?

    Je m’engouffre sous la passerelle. Un quartier invisible apparaît. Encerclé de grillages barbelés, une construction en forme de cube arbore un panneau cabossé, sur lequel on peut encore déchiffrer « Danger. Centrale haute tension ». De l’autre côté de la rue, à gauche, la maison de Lucie fait peine à voir. La cour, recouverte d’une dalle en béton, est remplie de vieux meubles de jardin en plastique, dont il est difficile d’imaginer la couleur initiale. Le gris de la façade est renforcé par l’ombre de la passerelle qui plane au dessus de la maison. Je regarde la fenêtre de gauche au premier étage. Les vieux rideaux à fleurs rosâtres de la chambre de Lucie sont fermés. Elle n’est pas là. Où aller ?

    Je continue dans l’impasse, qui se termine sur un grand terrain en friche, séparant les habitations des rails. Une fois au bout, je tourne la tête à gauche, puis à droite. Pas de train en vue. Les deux grandes lignes métalliques qui passent entre mes pieds semblent se prolonger à l’infini. Où aller ?

    Je traverse la voie, en direction de la Cité de la Galathée. Une immense barre d’immeubles se dresse devant moi. En dessous, une petite maison abandonnée. Le grillage a été forcé. J’emprunte cette ouverture imprévue pour pénétrer dans le jardin. En l’absence d’occupants, les plantes se sont appropriées l’espace. Je me fraie un chemin entre les ronces jusqu’à la porte d’entrée. Je tourne la poignée. C’est fermé. Où aller ?

     

    Jeanne Lapujade


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